Physical Address

304 North Cardinal St.
Dorchester Center, MA 02124

Forêts : « En faisant de la plantation d’arbres la règle, Emmanuel Macron a fait le choix d’une politique soutenant les pratiques les plus controversées »

Dans l’inconscient collectif, planter un arbre est un symbole d’action écologique. En annonçant vouloir planter 1 milliard d’arbres en dix ans pour « renouveler » les forêts françaises, le président de la République a voulu marquer les esprits. Mais une forêt ne se gère pas en plantant des arbres. Au contraire, en faisant de la plantation la règle, Emmanuel Macron a fait le choix d’une politique forestière soutenant les pratiques les plus controversées au détriment de l’émergence d’une sylviculture plus durable basée sur les dynamiques naturelles et la résilience.
Le premier constat est que, dans plus de 85 % des projets financés, la forêt a été rasée avant d’être replantée. Parfois, malheureusement, ces coupes rases sont nécessaires. Mais les critères de sélection des projets sont si flous que les abus ont été et sont encore nombreux. Il suffit qu’une forêt comporte 20 % d’arbres dépérissants pour qu’elle puisse être qualifiée de sinistrée ou vulnérable. En conséquence, même si 80 % des arbres sont vivants, elle peut être rasée et replantée. Le plus souvent avec des résineux, plus recherchés par l’industrie.
L’argument avancé est que si l’on ne fait rien, les forêts vont dépérir : il faudrait donc anticiper en les rasant. Or, installer un nouveau peuplement à la place de l’existant est un pari risqué : les jeunes arbres plantés, mis en pleine lumière, souffrent de la chaleur et du stress hydrique, tandis que ceux qui poussent en pleine forêt sont protégés par l’ombre des grands arbres. Plutôt que de corriger le tir, le gouvernement s’entête : dans la nouvelle version du cahier des charges, les échecs de plantation deviennent éligibles aux subventions.
Cette politique est en contradiction, de plus en plus flagrante, avec le droit européen. Aucune évaluation environnementale n’a été réalisée, alors que les impacts sur la biodiversité ou le puits de carbone sont significatifs. En détruisant de façon volontaire des stocks de carbone, le gouvernement prend le risque de ne pas respecter son objectif d’absorption de carbone dans le secteur des terres à l’horizon 2030 et de s’exposer à une très forte amende.
Dernière réalité, cette politique de plantation est très gourmande en fonds publics. Le volet forestier du plan de relance a coûté environ 150 millions d’euros pour « renouveler » environ 36 000 hectares de forêt, soit un investissement public de 4 145 euros par hectare. Malgré ce fort niveau de dépenses, de nombreuses forêts, notamment des forêts publiques dans le Grand-Est, n’ont pas pu être reconstituées. Certains acteurs de la forêt privés ont, en effet, capté ces aides pour financer des projets « ne relevant pas directement de l’adaptation des forêts au changement climatique », comme le souligne la Cour des comptes.
Il vous reste 42.03% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

en_USEnglish